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le blog de marwa

14 avril 2005

la communication

De nos jours, la communication est une valeur à la mode : " Il faut communiquer ! ", répète-t-on aux chefs d’entreprise et aux politiciens, aux infirmières et aux médecins, aux fonctionnaires et aux enseignants. Les publicitaires sont les gourous de l’époque. Souvent, on reproche au gouvernement, à l’administration, à l’hôpital, à l’entreprise de ne pas savoir expliquer ce qu’ils font plus que de le mal faire.

Sans doute ce mouvement participe-t-il d’un souci louable d’ouverture, de dialogue, de transparence. À l’école, ces thèmes sont mis en valeur, on préconise la coopération avec les familles, le travail en équipe, la participation à la vie des établissements, le décloisonnement, l’expression sereine des conflits et des divergences…

Je ne voudrais pas ici entrer en guerre contre une idéologie de la communication à laquelle les sciences humaines ne sont d’ailleurs pas étrangères. Tant les analystes de la famille que les politologues, les psychiatres, les sociologues du travail montrent que le fonctionnement des institutions et des groupes, l’émergence et la résolution des crises et des conflits dépendent en bonne partie des réseaux et des modes de communication en vigueur. Il s’ensuit logiquement qu’on peut souvent tenter d’améliorer les choses en améliorant la communication. Que certains " spécialistes " y trouvent leur intérêt, que la communication soit devenue une profession et un créneau sur le marché de la formation, de l’intervention, du conseil, de la recherche appliquée, ne suffit pas à invalider les fondements théoriques de la démarche. Mais la mode ne devrait pas nous faire oublier que, comme la langue d’Ésope, la communication n’est en soi ni bonne ni mauvaise. Tout dépend des pouvoirs, des stratégies et des finalités qu’elle sert.

  • Communication n’est pas synonyme de coopération : elle est aussi instrument de dénigrement, de critique, de répression, d’exclusion, de conflit symbolique.
  • Communication n’est pas synonyme de confiance : on communique aussi pour mentir, tromper, falsifier la réalité.
  • Communication n’est pas synonyme de transparence : on communique pour désinformer, manipuler, jeter de la poudre aux yeux, construire une façade, sauver les apparences.
  • Communication n’est pas synonyme d’égalité, de symétrie : on communique aussi pour commander, justifier une hiérarchie, des privilèges, des ségrégations.
  • Communication n’est pas synonyme de liberté : on communique aussi pour laver le cerveau, aliéner, faire intérioriser des normes, instaurer des tabous.
  • Communication n’est pas synonyme de rationalité : la publicité et la propagande (politique, religieuse, commerciale) jouent largement sur l’inconscient et les mobiles les moins rationnels de l’être humain. Le Dr Goebbels avait à cet égard quelques longueurs d’avance…
  • Communication n’est pas synonyme d’apprentissage : dans la vie quotidienne, le rôle majeur de la conversation n’est pas d’ébranler, mais de renforcer des idées reçues, de conforter chacun dans ses stéréotypes et ses habitudes de pensée.
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14 avril 2005

On ne peut pas ne pas communiquer ", nous

On ne peut pas ne pas communiquer ", nous rappelle Watzlawick. Chacun communique et, contrairement à M. Jourdain découvrant sur le tard qu’il faisait de la prose, chacun sait qu’il communique et sait aussi, aujourd’hui plus que jamais :

  • que la communication est un moteur, un outil, un enjeu dans toutes sortes de situations de la vie sociale, professionnelle, civique, personnelle ;
  • que les compétences de communication peuvent être développées et font partie du capital culturel rentable tant à l’école que dans d’autres cadres ;
  • qu’au départ ces compétences sont mal partagées, en raison de la diversité des personnalités et des héritages culturels.

On pourrait facilement allonger cette liste de lieux communs. Ils témoignent de la place que la culture contemporaine donne à la communication. Je pense ici à la culture des sociétés complexes, conscientes du poids des media et de l’importance des échanges dans la vie quotidienne, au travail, dans la cité, dans la famille ou le couple. Je pense plus encore à la culture des nouvelles classes moyennes, dont la communication est un nouveau credo. Je pense enfin à tous les métiers de l’humain, &emdash; soins infirmiers, psychologie, travail social, enseignement, animation &emdash; pour lesquels la communication est à la fois l’objet et l’outil de la pratique.

Qu’en pensent les enseignants ? Rejoignent-ils les propos qu’on peut entendre tous les jours en écoutant la radio ou en ouvrant un magazine ? Partagent-ils les valeurs et les représentations des classes moyennes ? Sans doute. Mais peut-être les infléchissent-ils sur tel ou tel point compte tenu du rapport au savoir, à l’enfance, à l’évaluation, à la norme qui caractérise leur métier. Pour le savoir, il faudrait mener une enquête. Mais une telle démarche, aussi bien conduite soit-elle, mettrait à jour les représentations qui n’engagent à rien, celles qui s’expriment hors de tout contexte, sans autre enjeu que de paraître ouvert et moderne aux yeux d’un interlocuteur. Saurait-on pour autant quelles formes de communication les enseignants mettent en œuvre dans leurs pratiques ?

Avoir une idéologie de la communication est une chose, survivre et maîtriser la situation dans une classe en est une autre. Je tenterai de montrer ici que la communication en classe ne peut être d’abord l’expression d’un idéal, fût-il en accord avec l’esprit du temps, mais une modalité de réalisation du curriculum (Perrenoud 1993 a), une modalité d’exercice du métier d’enseignant et du métier d’élève (Perrenoud, 1994 a). C’est donc une pratique complexe, prise dans un tissu de contradictions ou de dilemmes, qu’on ne peut maîtriser une fois pour toute. J’indiquerai, en guise de conclusion, quelques pistes pour la formation.

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